"L'écologie est devenue la nouvelle religion de ceux qui n'en n'ont pas."
Yves de KERDREL
"Face à l'écologie de la déconstruction, une écologie conservatrice est possible", telle est le sujet de la chronique parue dans le Figaro du 12 janvier dernier, chronique qui présente quelques extraits du livre de la philosophe Bérénice Levet "L'Ecologie ou l'ivresse de la table rase". On est loin de l'idéologie "écologiste" et de sa prêtresse Sainte Greta Thunberg, la Bernadette Soubirous du CO2 et la Jeanne d'Arc du climat, qui réalise des miracles en détectant le CO2 à l'œil nu (sic).
Le Figaro publie en exclusivité de larges extraits de cet essai limpide, subtil et élégant.
Réf. : Le Figaro, 12 janvier 2022
************************************************
EXTRAITS EXCLUSIFS - Dans son nouvel essai, L’Écologie ou l’ivresse de la table rase (Éditions de l’Observatoire), la philosophe
s’interroge : comment expliquer que l’écologie, censée être guidée par le souci
de la préservation, soit devenue l’étendard des progressistes les plus acharnés
?
Bérénice Levet, déjà remarquée,
notamment, pour Le Musée
imaginaire d’Hannah Arendt (Stock, 2011) et La Théorie du genre ou le monde rêvé des anges (Livre de poche, 2016), analyse le lyrisme
révolutionnaire d’une idéologie qui a pris le relais du marxisme et met en
procès la culture occidentale. Reprenant à son compte le vocabulaire de
l’intersectionnalité, de l’inclusivité et du refus des frontières, l’écologie
progressiste promeut la table rase et la déconstruction.
Selon la philosophe, une autre écologie est possible, qui ne serait pas une machine de guerre contre l’héritage occidental, mais puiserait dans notre culture les ressources pour contrer les dérives du productivisme et qui s’attacherait à la préservation de la beauté.
Le Figaro publie en exclusivité de larges extraits de cet essai limpide, subtil et élégant.
**************************************************
Bérénice Levet : « Face à l’écologie de la déconstruction, une écologie conservatrice est possible »
Une nouvelle idéologie
Est-ce à dire que là où une idéologie s’effondre,
fatalement un nouveau doit se lever ? (…) Ce que nous aurions pu prendre pour
la fin de la pièce en 1989, après la chute du mur de Berlin, ne fut, pour
paraphraser Tocqueville, que la fin d’un acte. Sur les ruines du marxisme, de
nouveaux messagers d’un monde radicalement nouveau se sont constitués, aux
récits moins charpentés sans doute, mais enfin, tout aussi systématiques,
dogmatiques, aveuglants.
Voici venu le temps de la Grande Marche sous la
bannière de l’écologie, de la lutte contre « le réchauffement climatique »,
contre « La sixième extinction de masse » et, rien de moins, pour « le
sauvetage de la planète ». « Réinventer » nos sociétés, nos villes, nos vies.
Le lyrisme révolutionnaire tourne à plein régime.
« Ce qui fait d’un homme de gauche un
homme de gauche, décrivait Milan Kundera dans L’Insoutenable
Légèreté de l’être, ce
n’est pas telle ou telle théorie, mais sa capacité à intégrer n’importe quelle
théorie dans le kitsch de la Grande Marche.
» Et c’est ainsi que des données factuelles qui, dès la fin des
années 1960, venaient inquiéter le modèle de développement que nous
avions adopté depuis la révolution industrielle, et plus résolument encore
après la Seconde Guerre mondiale, se transformèrent en moteur d’une nouvelle «
aventure », ferment d’un énième cheminement vers une humanité unie, non
seulement réconciliée avec elle-même mais avec l’ensemble des vivants.
L’amoncellement des ruines les grise et
il ne s’agit surtout pas de rebâtir, mais de vivre dans un monde où rien jamais
ne se fixe
L’obsession de la démolition
« Nous n’avons pas peur des ruines, nous qui portons dans nos cœurs un monde nouveau. » Rien ne résume mieux l’état d’esprit des écologistes et de leurs satellites, Anne Hidalgo la première, que cette citation de l’anarchiste espagnol Buenaventura Durruti que le secrétaire national d’EELV, Julien Bayou, avait choisi de placer en exergue de son ouvrage En vert et avec tou.tes. Le philosophe Günther Anders distinguait entre deux formes de cynisme, un cynisme à la manière des Anciens qui s’épuise dans la formule « Tout peut être anéanti » et un cynisme à la manière des Modernes qui peut s’énoncer sous la forme du « Tout peut être reconstruit, dès lors l’anéantissement n’est pas si grave et peut même être une chance ». Plus de perte, plus de deuil - ce mot si « humain », ainsi que l’observe magnifiquement Anders. Il semble bien que, tout à l’ivresse de la déconstruction, nos écologistes ajoutent une troisième modalité de cynisme, l’amoncellement des ruines les grise et il ne s’agit surtout pas de rebâtir, mais de vivre dans un monde où rien jamais ne se fixe. Le slogan de campagne de Sandrine Rousseau à la primaire d’EELV pour la présidentielle de 2022, en est l’expression achevée : « Oui, les temps changent », proclamait triomphalement la candidate.
Comble du progressisme qui regarde le changement en
soi, quel que soit son sens, comme une heureuse nouvelle, mais plus
profondément conviction que le monde change dans « notre » sens. Une manière de
dire : de votre vieux monde, de vos attachements, de vos fidélités, il ne restera
rien.
Un gigantesque enlaidissement
«France, ta beauté fout le camp !», avertissait-on dans les années 1970. Hier, le saccage de la France se faisait au nom de la modernisation, aujourd’hui c’est au nom de l’écologie. Après les lotissements standardisés, les zones commerciales, les panneaux publicitaires à l’entrée des villes, les ronds-points défigurant notre pays, voici venu le temps des bornes pour les vélos, les scooters et les voitures électriques, le temps des trottinettes jonchant le sol des villes, de la végétalisation anarchique des rues, chacun étant exhorté à jardiner dans l’espace public, et à devenir «acteur» de la lutte contre le réchauffement et du sauvetage de la biodiversité - sauf que le jardinage est un art - et, naturellement, le temps des éoliennes.
Et c’est ainsi que, à l’abri de la cause
du dérèglement climatique, les écologistes travaillent au « dérèglement esthétique
», selon l’expression inspirée d’Alexandre Gady, professeur d’histoire de l’art
à la Sorbonne, spécialiste du XVIIe siècle. Le grand paradoxe de notre présent
tient à ce que, après les promoteurs qui ont œuvré à la bétonisation de la
France, dans les années 1960-1970, ce sont les écologistes qui se comportent en « maîtres et possesseurs de la nature », autrement dit selon le credo de la modernité
technicienne hautement compromis dans la dévastation de la Terre et des terres.
La France et les villes dont ils sont les maires ne sont aux élus EELV et
apparentés que de vastes terrains à « réinventer » dans une indifférence
parfaite à leur physionomie propre, historiquement constituée.
L’écologie, prétexte commode
Les écologistes sont comme des poissons
dans l’eau dans un monde régi et réglé par les identités. (…) « Pas de justice climatique sans justice de genre !» proclamait-on au cours des « marches pour le climat
», en 2018 ; en novembre 2019, le secrétaire national d’EELV, alors
porte-parole du mouvement, Julien Bayou, Sandra Regol et la sénatrice EELV,
Esther Benbassa, participaient «au nom du Parti » à la « marche contre l’islamophobie
» organisée par le Comité contre l’islamophobie en France (collectif dissous en
2020). Quant au programme des Journées d’été d’EELV 2021, les propositions de
rééducation des esprits foisonnent : « atelier ludique créatif » pour «
apprendre à parler épicène et lutter contre la domination patriarcale
par le langage ; un autre pour « déconstruire la colonisation
patriarcale des imaginaires », ou encore un « Boot Camp écoféministe » « en
non-mixité » consacré à l’« Empouvoirement, les femmes aux responsabilités». La
liste est loin d’être exhaustive.
Être écologiste, militant ou politique à
la manière d’EELV et de ses satellites socialistes, c’est d’abord être en
guerre, et en guerre contre la domination, toutes les formes de domination
La perplexité nous gagne : quel lien peut-on bien
établir entre la crise écologique et la société patriarcale ? Entre le
réchauffement climatique et le colonialisme ? Entre la disparition de certaines
espèces vivantes et l’esclavagisme ou le racisme ? Il est cependant
inextricable dans l’esprit des écologistes.
La nature, les bêtes, les femmes, les
minorités sont toutes et chacune victimes de l’homme occidental.
Féministes, indigénistes,
décoloniaux, associations LGBT et écologistes
communient dans le Grand récit de l’intersectionnalité ; celui d’un Occident
regardé et présenté comme une vaste fabrique de victimes. (…)
Vous pensiez qu’être écologiste c’est avoir
le souci de conserver, de préserver ce qui nous a été confié et dont la vie sur
Terre dépend. Détrompez-vous : être écologiste, militant ou politique à la
manière d’EELV et de ses satellites socialistes, c’est d’abord être en guerre,
et en guerre contre la domination, toutes les formes de domination.
Une conception de l’homme
C’est un des points qui m’a le plus
frappée au cours de mes recherches : l’incrimination systématique de
l’homme. « Tout est bien sortant des mains de
l’auteur des choses, tout dégénère entre les mains de l’homme », écrivait Rousseau. Tel est en somme le refrain dont
on nous tympanise à longueur de temps. Certes, on accuse d’abord l’homme
moderne, l’homme de la révolution industrielle. Un mot a même été forgé à cet effet
: « anthropocène ». Mais bientôt le propos se fait plus général et c’est
l’homme et ses activités en tant que tels qui se retrouvent inculpés. Le sort,
funeste, de la Terre aurait été scellé en quelque sorte avec la sédentarisation
de l’humanité, au néolithique.
(…) L’homme des écologistes est sans histoire, sans
épaisseur temporelle, sans sédimentation historique ; créature naturelle
aplatie, aplanie sur le présent, voyageur sans bagages. D’où leur défense d’une
politique d’immigration de l’accueil inconditionné, ainsi qu’on l’a vu, et
d’une société dite « inclusive ». Le citoyen à la EELV peut invoquer avec
emphase notre responsabilité envers les générations futures, mais leur sens de
l’histoire s’arrête là : ils ne se reconnaissent aucune implication dans
l’héritage du passé. Or, la diffraction du temps en présent, passé et futur
n’appartient qu’à l’homme, fait l’homme. La
mémoire, l’entretien du souvenir, la fidélité sont de l’homme et de lui seul.
L’Occident en procès
Notre architecture conceptuelle serait à l’origine du
mal que nous avons fait à la nature. Philippe Descola, Bruno Latour, chacun
fredonne la ritournelle, convenue et lassante, d’un Occident qui aurait voulu «
réduire » le monde - le mot est de Latour - à de grandes oppositions : l’homme
et la nature ; l’artifice et le vivant ; le rationnel et
l’irrationnel ; l’individu et le collectif.
Le dérèglement écologique viendrait
rendre éclatante l’inanité de ce que l’auteur de Nous n’avons jamais été modernes appelle le « Grand Partage » et vérifierait que
l’homme n’est pas séparé de la nature, mais « immergé » en elle. Le rapport
occidental à la nature n’est assurément pas celui des peuples animistes,
totémistes, analogiques pour reprendre les catégories établies par Descola,
mais il n’est pas sans vertu. Et ce sont ces vertus qu’il nous faut donner à
connaître et à aimer.
Les écologistes et singulièrement leurs
penseurs se refusent à voir quoi que ce soit de précieux dans la forme
d’humanité que nous incarnons
Contre la modernité occidentale, on ne joue pas
d’autres civilisations, on joue l’Occident. Les écologistes et singulièrement
leurs penseurs se refusent à voir quoi que ce soit de précieux dans la forme
d’humanité que nous incarnons, et prennent prétexte de l’inquiétude écologique
pour alourdir le dossier de notre culpabilité devant l’éternel. Or, les
ressources contre les dévastations induites par la logique productiviste et le
règne de l’individu délié, autrement dit par la coalition de l’ultralibéralisme
économique et du libéralisme sociétal, se trouvent dans nos civilisations.
Longtemps, nous avons cultivé une idée
plus noble de l’homme que celle d’homo
œconomicus et du sujet de droits. La forme de
vie occidentale s’offre comme une voie médiane et qui n’a pas toujours démérité
- témoins nos civilisations qui ne se sont pas construites exclusivement contre
le donné naturel, contre les bêtes, mais avec elles, et singulièrement en
France, civilisation rurale par excellence.
Le refus des limites
Paradoxalement, ou plutôt force et poids du préjugé,
l’écologie se refuse à penser et à légitimer la notion de limites. Sans doute
répète-t-on en boucle que les ressources de la planète ne sont pas illimitées,
mais c’est seulement pour multiplier les interdits les plus arbitraires -
limiter la vitesse de circulation parce que l’on a décrété que les voitures
devraient disparaître du paysage des villes.
Dans une négation obstinée de la finitude humaine,
l’écologie travaille au contraire à l’effacement de toutes les frontières :
frontière entre les espèces et, frontières honnies entre toutes, les frontières
nationales. (…) Les écologistes sont et demeurent des « mondialistes ». Comme
les impérialistes du XIXe siècle, ils s’orientent à l’échelle de la
Planète. Pour les écologistes, la notion de peuple, cet intermédiaire entre
l’individu et l’humanité, cimenté par des souvenirs communs, n’a ni réalité ni
légitimité.
Une autre écologie est possible
Si l’« urgence » écologique devait avoir quelque
vertu, ce serait celle de nous rappeler à nos possibilités les plus élevées,
nous remémorer, je l’ai déjà dit, que l’homme est voué à de plus nobles tâches
que celles de consommer et de consumer, d’épuiser et de détruire ce qui lui est
confié.
Quand l’homme érode les sols ou
transforme les vaches en machines à produire de la viande, il porte atteinte à
la nature, au vivant certes, mais d’abord, si j’ose dire, à lui-même. « Un homme, ça s’empêche », disait Camus. Là est sa noblesse.
Je ne milite pas pour la décroissance, je milite pour
un homme qui se fixe à lui-même des limites. Il n’est rien de plus grotesque et
de plus insupportable que d’entendre les écologistes pourfendre le consumérisme
quand, avec toute la gauche, ils l’ont introduit dans le domaine de la culture
- qui doit être ludique, vivante, désacralisée, bref aisée à consommer - ou
dans le domaine de la vie, où la PMA et bientôt, à n’en pas douter, la GPA
doivent satisfaire au « désir d’enfant » de chacun. (…)
Comme la nature, les trésors de la
civilisation, à commencer par la langue, sont périssables
Une écologie conservatrice, c’est ainsi au contraire
une écologie qui prend appui sur ces dispositions humaines. Partant, qui ne
sépare pas la nature de la culture, et encore moins ne joue la première contre
la seconde. Comme la nature, les trésors de la civilisation, à commencer par la
langue, sont périssables, et ensemble ils doivent pouvoir compter sur un être
capable de prendre soin de ce qui est confié à sa garde.
Modelé d’écologie conservatrice, on lira
l’admirable plaidoyer en faveur des arbres que le président Pompidou
adressa à son premier ministre Jacques Chaban-Delmas, en juillet 1970 :
« La
France, argumente ainsi magnifiquement Pompidou, n’est pas faite seulement pour permettre
aux Français de circuler en voiture, et, quelle que soit l’importance des
problèmes de sécurité routière, cela ne doit pas aboutir à défigurer son
paysage. (…) La sauvegarde des arbres plantés au bord des routes - et je pense
en particulier aux magnifiques routes du Midi bordées de platanes - est
essentielle pour la beauté de notre pays, pour la protection de la nature, pour
la sauvegarde d’un milieu humain. » (…)
Et l’on se prend à rêver d’un président capable
aujourd’hui d’une telle liberté à l’endroit des lobbys des énergies
renouvelables et d’une telle profession de foi dans la beauté, interrompant
impérieusement sa ministre de la Transition écologique entraînée dans une
course effrénée à l’implantation de ces redoutables mâts.
******************************
L'écologie n'est plus une science, ni seulement une politique. Elle est devenue désormais une religion intolérante, l'écologisme, avec ses dogmes, ses grands prêtres et ses petites papesses, telle l'inénarrable Greta Thunberg, fantoche manipulée par le milliardaire Soros, agitateur de salon, et sa clique bobo-écolo.
La protection de notre terre est un sujet trop difficile pour la confier à des idéologues ignares qui ne font pas la différence entre un changement climatique naturel et un réchauffement climatique calculé par des modèles mathématiques bidonnés.
On ne lutte pas contre les changements climatiques par un une écologie déconstructive, on s'y adapte par des actions raisonnées et raisonnables. Et certainement pas en s'agitant sur sa chaise en répétant : "Sainte Greta, priez pour nous pauvres pollueurs"!....
"L'écologie, c'est l'Inquisition. Pour être dans le moule, il faut parler du réchauffement climatique."
Olivier de KERSAUSON
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire