lundi 26 mai 2025

ENSEMBLE VOCAL RENNAISSANCE Concert 2025

 



"La musique, elle nous prend comme une mère".

                        Charles BAUDELAIRE

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                    Très beau concert vendredi 23 mai dernier à la cathédrale Notre-Dame du Havre donné par l'Ensemble Vocal Renaissance dirigé par Emmanuelle Pascal-Falala avec la participation de musiciens du conservatoire Honegger et les solistes  Anne-Cécile Laurent (Soprano), Anne-Claire Tilly (Alto), Cédric Le Barbier (Basse).

 


           PRÉSENTATION DU PROGRAMME

                                                                                                                                                        

                 Des profondeurs sombres d’une cantate de Bach à la lumière éclatante des psaumes de Zelenka, nous découvrons ce soir la prestigieuse inventivité de deux compositeurs baroques contemporains, inspirés par une foi inébranlable, le luthérien allemand Bach et le catholique Zelenka.


                    Jean Sébastien BACH (1685 -1750)

 

                   Bach a écrit la cantate Aus der Tiefer rufe, Herr zu Dir (BWV131) en 1707 à l’âge de 22 ans. Il est admis aujourd’hui que cette « cantate de pénitence pour un office expiatoire » est la toute première des près de trois cents cantates écrites par le Cantor de Leipzig. Le texte, composé à partir du Psaume 130 (De Profundis Clamavi), est une intense prière adressée à Dieu par l’homme dans la détresse, souffrant du poids de ses fautes mais espérant dans l’attente du Seigneur : « Aus der Tiefen rufe ich, Herr, zu dir. Herr, höre meine Stimme » (Des profondeurs je crie vers toi, Seigneur, écoute mon appel).

 

Dans  cette cantate Bach  développe pour la première fois « l’exaltation pénitentielle » de Martin Luther pour qui la musique devait donner de l’expressivité aux textes bibliques. Cette exaltation, cet attrait émotionnel de la musique éclate lorsque le chœur chante : « Ich harre des Herrn, meine Seele harret, und ich hoffe auf sein Wort » (J’attends le Seigneur, mon âme attend le Seigneur et j’espère en sa Parole).

 Les thèmes de la supplication, de la douleur, de l’imploration, de l’espérance et de la joie sont abordés en cinq mouvements enchaînés selon la technique du motet, faisant de cette œuvre une véritable fresque d’une grande profondeur d’inspiration. Bach illustre brillamment en cela la conception luthérienne de la vie qu’il avait adoptée, en particulier la nécessité d’affronter la mort avec courage, voire avec joie, espoir et foi.

               

                      Qui mieux que Raphaël Pichon, grand admirateur de Bach, peut écrire :

« Bach est un compositeur plus humain que tout autre mettant tout son génie au service de Dieu et en l’Homme, persuadé que la musique est la première guérison de l’âme ».

 

 


                                       

                     Jan Dismas ZELENKA (1679 -1745)

     

                    Né en Bohème en 1679, Jan Dismas Zelenka, directeur musical à la Chapelle Royale de Dresde, est considéré comme le plus grand compositeur tchèque de son époque. Mais il faut attendre 1830 pour que ses œuvres soient redécouvertes, et les années 1960 pour qu’elles soient données en concert.

                   Chef de file d’un « baroque tardif », Zelenka, musicien au talent singulier et sensible, est un homme en avance sur son temps. Sa musique repose sur une parfaite mesure du contrepoint, une pulsation rythmique et une richesse d’écriture concertante dignes de Bach. Une musique qui étonne par sa virtuosité, dérange parfois l’oreille par ses harmonies hardies, et surprend par sa puissance émotionnelle et sa profonde densité liturgique.

Son style est aussi démonstratif que celui de Bach est sévère. Son inspiration plus passionnée et joyeuse l’apparente souvent à Vivaldi et Haendel. Tout n’est qu’imprévisibilité dans la musique de Zelenka, ce qui en fait sa principale richesse et…sa difficulté d’interprétation.

                   Les trois pièces interprétées ce soir ont été écrites en 1727-1728. Il s’agit de psaumes mis en musique « pour la célébration des Vêpres pour l’année entière » (Psalmi Vespertini).

                         Nisi Dominus (ZWV 92, Psaume 126) se présente comme un dialogue dynamique entre chœur et voix solistes. Propulsé par un ostinato instrumental de huit mesures joué à l’unisson, le discours musical suit pas à pas le texte latin et change de couleur au gré des modulations successives, presque toutes dans le mode mineur. Il se conclut par un Amen d’une infinie tendresse.

                         Lauda Jerusalem (ZWV 104, Psaume 147) pour ténor soliste et chœur, est une prière de louange pleine de vitalité construite en forme de refrain-couplets auquel se greffe un ostinato resserré créant une cohésion remarquable entre thématique, forme et expression. L’œuvre s’achève par une fugue sur un motif déjà présenté. Toute la maîtrise et l’inventivité de l’écriture de Zelenka se trouve ainsi résumée dans cette courte pièce.   

                       La musique audacieuse et tourmentée du Dixit Dominus (ZWV 66, Psaume 109) témoigne davantage encore de la relation intime que Zelenka parvient à créer entre texte et musique. Le psaume 109, évoquant la puissance divine, le jugement dernier et le châtiment, est traité de manière théâtrale et descriptive dans une succession de courtes scènes.  Cette œuvre, à la vivacité toute haendélienne, est un somptueux chemin musical chargé d’émotions diverses et d’envolées lyriques, fragmenté par des silences expressifs et des changements de rythmes et de tonalité.

                                           C’est cette musique pleine de caractère qui a fait dire à un musicologue allemand, Wolfgang Horn : « La musique de Zelenka ne coule pas comme un fleuve paisible mais plutôt comme un torrent qui se brise continuellement sur un rocher ».




 "Quand je voulais chanter l'amour, il se faisait douleur. Et si je me mettais à chanter la douleur, alors elle se faisait amour".

                        Franz SCHUBERT

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